Aujourd'hui, Jean-Michel, technicien en documentation nous prtage ses réflexions sur le Courrier de Marie-Reine, la chronique réservée aux dames publiée dans le journal La Sentinelle au début des années 1960.
Marie-Reine, de son vrai nom Georgette-P. Beaulne, elle est une femme de Malartic. Elle a développé sa notoriété dans les années 1940 alors qu’elle était rédactrice pour les filles d’Isabelle de Malartic. C’est en 1947 qu’elle publie pour la première fois sa chronique dans un journal abitibien, La Gazette du nord.
Madame Beaulne, lorsqu’on la lit aujourd’hui peut nous donner froid dans le dos… Elle était une femme de son époque, conservatrice, qui soutenait la domination de l’église et des hommes en son temps. Ce qui fait en sorte que parfois ses dires ont “mal vieilli”
Elle recevait des lettres de la part d’hommes, mais surtout de femmes, auxquelles elle répondait dans sa rubrique publiée à peu près toutes les semaines dans la Sentinelle, mais aussi dans d’autres journaux d’Abitibi.
Les sujets pouvaient être anodins comme ceux-ci:
“J’attends mon premier bébé et j’aimerais savoir ce que comprend le trousseau et les autres articles nécessaires”, “ au cours de mes vacances, j’ai tâché une robe […] Connaissez-vous un moyen d’enlever cette tache?” “[...] jeune fille de 13 ans […] invitée à un mariage […] que devrais-je porter?”
Mais il arrivait aussi à Marie-Reine d’avoir à conseiller sur des sujets beaucoup plus sérieux et sensibles, qui témoignent de la détresse de nombreuses femmes :
“ma santé n’est plus très bonne et je n’ose pas me plaindre à mes enfants[…]”, “J’ai épousé, il y a 12 ans, celui que j’aimais […] depuis 3 ans il entretient une autre femme mariée et mère de famille […] je suis tenté d’avertir son mari… j’ai 3 enfants avec mon mari… devrais-je le quitter […]”, “ Mon mari me bat depuis que je suis marié[…] il me traite comme une esclave […] comment pourrais-je me sortir de cette situation?”

Elle écrivait à une époque où les femmes ne s’étaient pas encore émancipées du rôle de ménagère, et où elles ne joussaient pas de beaucoup de liberté. Malheureusement, beaucoup de ses réponses n’étaient pas témoignées d’empathie ou de conseils pour encourager ses lectrices à prendre leur indépendance… On y retrouvait bien souvent une rafale de jugements, ou des recommandations les enfonçant davantage dans leur détresse.
“votre devoir est de garder la paix dans votre ménage”, “n’attendez pas d’être l’une de ces loques humaines qui boivent de taverne en taverne”, “l’alcoolisme est la maladie des lâches”, “si vous êtes intelligente, ne le laissez pas paraître, un homme se sent plus en sécurité avec une femme pas trop brillante”et ceci n’est que quelques exemples.

Malgré ce côté plus sombre de ses conseils, il lui arrivait aussi de conseiller ses lectrices de manière bienveillante et un peu plus positive:
“être une bonne mère de famille, ce n’est pas seulement prendre soin de ses enfants quand ils sont petits, mais c’est surtout être leur soutien et leur guide quand ils ont grandi.”, “ l’éducation […] n’est pas un moule uniforme que l’on impose, sans discernement, à tous les membres d’une famille”, “l’indifférence au sujet des problèmes et des peines des adolescents… est l’une des graves erreurs des éducateurs[…]”, “ Je ne me flatte pas de “régler les problèmes” […] je m'efforce […] de donner des suggestions pratiques aux aimables correspondants qui me font l’honneur de m’écrire.”
Une chose est certaine, la rubrique de Marie-Reine était une des rares plateforme de l’époque à donner un droit de parole aux femmes, et témoigne du contexte de vie que vivaient les femmes il y a 70 ans…
En rédigeant cet article de blogue, j’ai pris conscience de tout le chemin parcouru par les femmes lors des années qui ont suivi cette rubrique… Je ne peux qu’être fier pour tous ces pas difficiles fait par la gente féminine… Bien sûr, il reste encore des pas à faire, mais c’est quand on regarde en arrière qu’on se rend compte de la portée réelle de tous les efforts de ses femmes qui nous ont précédées.
Je me suis rappelé mes grands-mères, qui vivaient à cette époque… Je leur rends donc hommage à ces deux femmes fortes qui m’ont inspiré à avancer à coup de bienveillance et d’acceptation des différences face à une vie qui parfois peut sembler sans issue…