Vos photos, lettres, journaux intimes, documents qui peuvent vous paraître inutiles sont des sources exceptionnelles d’informations pour ceux qui cherchent à comprendre l’histoire d’une population ou d’une communauté. Cela peut paraître anodin, mais qui n’a jamais passé des heures plongé dans de vieilles photos de nos grands-parents ou de nos arrières-grands-parents. Un bout de papier avec l’écriture d’untel, une lettre d’un autre, tout cela peut nous renseigner sur la vie quotidienne et la réalité de nombreuses personnes. Sans archives, il est quasi impossible de raconter l’histoire d’une communauté.
Ce dur constat est en fait une réalité pour les archives des membres de la communauté LGBTQ2+. À l’occasion du mois des fiertés, nous souhaitions justement souligner cet évènement grâce à certaines photographies provenant de nos archives. Malheureusement, notre centre d’archives ne possède pas encore d’archives ayant appartenu à des personnes issues de la communauté LGBTQ2+ et ayant vécu dans la région. La raison est simple : les archives de ces personnes sont, encore aujourd’hui, rarement confiées aux centres d’archives régionaux. Elles sont même à risque de disparaître. Pendant longtemps, certains membres de ces communautés détruisaient leurs archives (journaux intimes, photographies, lettres…) pour se protéger de représailles. Les familles pouvaient aussi les détruire par honte. Lorsque ces documents parvenaient dans un centre d’archives, il arrivait tout de même qu’ils soient détruits. Considérés impertinents au mieux, vulgaires au pire, le traitement des documents dépend toujours de l’archiviste qui en a la garde. Finalement, les membres des communautés LGBTQ2+ ont longtemps pu croire que leurs archives n’avaient pas leur place dans les centres d’archives « traditionnels » (sociétés d’histoire, musées et organismes spécialisés), que les témoignages de leurs parcours ne « valaient pas la peine » d’être préservés. Rien n'est plus faux. Heureusement, il existe aujourd’hui des organismes dont la mission est de collecter les archives des personnes appartenant à la communauté LGBTQ2+, comme les Archives gaies du Québec et les Archives lesbiennes du Québec entre autres.
En ce qui concerne notre société d’histoire, il est déjà difficile d’obtenir des archives représentatives de l’ensemble de la région, il est donc encore plus complexe d’acquérir celles des membres des communautés LGBTQ+. Il faut dire que, à l’époque du boom économique que connaît la Baie-James dans les années 1970 et 1980, les personnes ayant une orientation sexuelle autre qu’hétérosexuelle pouvaient parfois être mal vues et mal reçues. Elles avaient donc parfois peut-être intérêt à ne pas le faire savoir. Outre les quelques anecdotes que nous avons recueillies sur les travailleurs homosexuels à la Baie-James ou les informations disponibles dans les archives judiciaires, nous manquons d’un grand nombre d’informations sur la vie quotidienne des personnes issues de la communauté LGBTQ2+ dans la région.
Le don de leurs archives est le point de départ vers une meilleure compréhension de leur quotidien et des difficultés qu’elles pouvaient rencontrer liées à leur orientation sexuelle. Sans archives, les membres de cette communauté sont invisibilisés et il devient difficile de raconter leurs histoires. La représentativité est importante, car elle nous permet de reconstituer l’histoire de nos communautés et d’inclure tous les types de parcours. L’acquisition de nouvelles archives nous permettra peut-être un jour d’écrire sur l’histoire des membres des communautés LGBTQ2+ à la Baie-James. Il serait temps de sortir cette histoire de l’ombre.
Si vous souhaitez en savoir plus, voici quelques liens intéressants à propos des archives des membres de la communauté LGBTQ2+ :
- Un réseau international d’archives queer, Histoire Engagée,
- Les Archives gaies du Québec,
- Les Archives lesbiennes du Québec,
- Big Tata, le premier réseau des Bibliothèques et Centres d’archives LGBTQIA+.
Photographies :
SHBJ | P5, S2, SS4, D104, P7 | Drapeau de la fierté gaie flottant devant l’Hôtel de Ville. 15 mai 2023.
SHBJ | P5, S2, SS4, D104, P26 | Levé du drapeau de la fierté devant l’Hôtel de ville de Chibougamau. 17 mai 2024.