En avril 2025, nos collègues de la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or ont fait un cadeau de grande valeur au patrimoine de la Baie-James. Nos voisins de la Vallée de l’Or nous ont confié 3 collections d’archives portant sur le Nord-du-Québec.
Des archives d’exception
Parmi les archives qui nous ont été confiées par la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or, la collection Jean-Baptiste Lebel nous a fourni de formidables surprises. Si monsieur Lebel est connu comme un entrepreneur forestier prospère et comme fondateur de Lebel-sur-Quévillon, c’était aussi un homme aux milles projets. Son intérêt pour les ressources naturelles l’ont mené à collecter en 1948 près de 200 photographies touchant l’ensemble de l’actuel Nord-du-Québec.
Sa collection contient quelques pépites, comme des scènes des expéditions de James Richardson (1860) et Albert Peter Low (1890-1899) pour le compte de la Commission géologique du Canada. Sa collection nous dévoile les paysages allant du lac Opémiska, aux premières mines de Chibougamau, en passant par les rivières Eastmain, Grande baleine, Kuujjuaq et même la côte du Labrador.
La plus grande surprise de l’équipe : une photographie de deux prospecteurs jusqu’alors non identifiés. Nos équipes ont rapidement pu établir leur identité. Il s’agît de Leo Springer et son pilote Lloyd B. Rochester. Une trouvaille qui tombe à point ! En 1929, Leo Springer, son pilote Lloyd B. Rochester et accompagnés des prospecteurs Joe Perry et Gaston Robitaille est à la recherche de cuivre dans la région du lac Opémiska. Un trappeur, Charles Dixon, lui a parlé d’affleurements qui pourraient l’intéresser… Il découvre un gisement de cuivre, qui mènera à l’ouverture de la mine Opémiska et à la fondation de la ville de Chapais. Cette année marque le 70e anniversaire de la ville de Chapais.
Près de 60 ans après le décès de Jean-Baptiste Lebel, et grâce à la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or, cette pièce d’archives rejoint nos collections à temps pour le 70e anniversaire de Chapais. Il s’agît à notre connaissance, la seule photographie de Leo Springer conservée dans la région !
Le principe de territorialité
Le transfert d’archives n’est jamais une décision facile. La conservation de documents anciens implique beaucoup de temps, d’efforts, et est parfois accompagnée d’une charge émotive. Les archivistes aiment, sincèrement, les documents qui leur sont confiés et sont fiers des acquisitions réalisées par leur centre. C’est particulièrement le cas lorsque les documents sont anciens et d’une grande importance historique. Ce transfert de documents représente donc une collaboration précieuse, et dont nous sommes très reconnaissants.
Un des principes fondamental dans le monde des archives est la territorialité. Ce principe guide les politiques d’acquisitions, mais aussi les décisions de conservation et de tri. L’archive fait du sens sur le territoire d'où elle provient. Les archives devraient toujours être conservées dans les régions où elles ont été créées, et là où elles sont les plus susceptibles d’être comprises, protégées et valorisées.
Le cas de la Baie-James est particulier. Longtemps divisée entre le Saguenay-Lac Saint-Jean et l’Abitibi-Témiscamingue, de nombreuses archives de notre territoire sont éparpillées au sein de centres d’archives des autres régions. Or, il ne suffit pas de demander gentillement un rapatriement des documents qui nous touchent. Un autre principe fondateur du monde des archives est le respect des fonds. L’ensemble des archives produites par une personne ou une organisation ne devraient pas être divisées, au risque de voir disparaître une foule de renseignements. Les archives font sens ensemble, et l’intégrité d’un fonds d’archives doit être préservée.
Mais comment faire lorsqu’une personne partage son parcours de vie entre plusieurs régions ? La population jamésienne est extrêmement mobile, et de nombreux parcours de vie se déroulent au sein de plusieurs régions. C’est ainsi que beaucoup d’archives touchant notre territoire se retrouvent chez nos voisins. Les collections qui nous ont été confiées par la Société d’histoire et de généalogie de Val-d’Or touchent uniquement le Nord-du-Québec. Une chance pour nous ! Il nous a été possible de recevoir ces documents de grande valeur, pour respecter la territorialité sans nuire à l’intégrité des fonds !
Une histoire de collaboration
La relation de collaboration entre nos deux organismes ne date pas de cette année. Au cours des dernières années, nos équipes ont pris l’habitude de se rencontrer sporadiquement pour échanger conseils, préoccupations, solutions, ressources et discuter de nos projets et idées. Ces petits gestes en apparence anodins contribuent non seulement à briser l’isolement de nos petites équipes, mais aussi à construire un réseau de solidarité entre les organismes patrimoniaux.
De la part de toute l’équipe de la SHBJ, merci !
Photographies :
- Lloyd B. Rochester et Leo Springer à Bateman Bay, lac aux Dorés, vers 1935. P202.S2.D1.P29
- Deux hommes en canot dans les rapides [de la rivière Broadback?], [19-?]. P202.S1.D1.P18
- Quatre hommes dans la région du lac Mistassini, montrant à l’avant-plan des calcaires de l’ère précambrienne, vers 1892. P202.S1.D1.P2
- Vue du poste de traite de Kuujjuaq (autrefois Fort Chimo), [189-?]. P202.S1.D1.P14
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Mine Consolidated Chibougamau Goldfields (Cedar Bay), vers 1934. P202.S1.D1.P31